Fabienne Cogulet Avocat . Docteur en Droit

Non respect du droit de visite et d’hébergement, que risque-t-on ?

28 août 2024

L’article 7 de la Convention internationale des droits de l’enfant consacre le droit de l’enfant de « connaître ses parents et d'être élevé par eux », dans la mesure du possible.

Les motifs légitimes permettant de déroger à ce droit fondamental de l'enfant d'être élevé par ses deux parents sont strictement encadrés par le juge.

Le Code pénal sanctionne en effet « le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer » d'une peine pouvant aller jusqu'à un an d'emprisonnement et 15.000 € d'amende (Art. 227-5 C. pén.)

Les peines maximales encourues sont mêmes portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 € d'amendes (Art. 227-9 C. pén.) :

  • Si l'enfant mineur est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu'il leur soit représenté sachent où il se trouve ;
  • Si l'enfant mineur est retenu indûment hors du territoire de la République ;

Dans un arrêt du 4 avril 2024 (crim.4 avril 2024, n° 23-84.683), la chambre criminelle est venue préciser ce qu'implique cette obligation de présentation de l'enfant qui pèse sur ses parents, dès lors que l'un et l'autre sont conjointement titulaires de l'autorité parentale.

Elle rappelle en premier lieu que le Juge aux affaires familiales est le juge « naturel » de l'organisation des relations entre l'enfant et ses parents. Par conséquent, lorsqu'il a rendu une décision par laquelle il a réglé les modalités pratiques de ces relations, en fixant le lieu de résidence principale chez l'un et/ou l'autre et en organisant le cas échéant un droit de visite et d'hébergement pour celui des parents chez lequel l'enfant ne vit pas habituellement, cette décision doit être respectée.

L'enfant lui-même doit s'y conformer tant qu'il est mineur, l'article 7 ne lui conférant pas une liberté de vivre avec ses parents comme il l'entend, mais la garantie fondamentale d'un droit, de même nature, par exemple, que le droit à l'éducation (article 28 de la CIDE).

La Cour de cassation considère d'ailleurs dans une jurisprudence constante que « la résistance d’un mineur à l’égard de celui qui le réclame ne saurait constituer pour celui qui a l’obligation de le représenter, ni une excuse légale, ni un fait justificatif à moins de circonstances exceptionnelles » ( par exemple : Crim. 15 juin 1994, n° 93-81.018).

Il est donc de la responsabilité du parent à qui il incombe de représenter l'enfant d'user de toute son autorité pour amener celui-ci à s'y conformer.

Dans l'arrêt du 4 avril dernier, la chambre criminelle apporte surtout des précisions sur le comportement qu'il convient d'adopter dans l'hypothèse où la remise de l'enfant serait de nature à le mettre en danger, seule situation de nature en effet à justifier une non remise de l'enfant à la personne en droit de le réclamer ( Art. 122-7 C. pén.)

Selon elle, il convient en première intention de saisir le Juge aux affaires familiales afin de lui demander de modifier en conséquence l'organisation de l’exercice de l’autorité parentale.

Si toutefois la situation de danger est telle qu'elle rend nécessaire une mise à distance immédiate de l'enfant, sans pouvoir attendre la nouvelle décision du Juge aux affaires familiales, et que le parent en droit de le réclamer dépose malgré tout une plainte pour non-représentation, le Procureur de la République procédera alors à une enquête préliminaire pour vérifier le bien-fondé des allégations de danger, avant de décider des suites qu'il donnera à la dite plainte (Art. D 47-11-3 C. pr. pén.).

S'il est établi que le danger allégué répond effectivement à l'exigence d'actualité ou d'imminence exigée pour être exonératoire de responsabilité pénale, la plainte pour non-représentation sera classée.

Dans le cas contraire, l'action publique sera en revanche engagée, et le parent soumis à l'obligation de remise de l'enfant sera renvoyé devant le tribunal correctionnel pour y être jugé.